Borréliose de Lyme "chronique"
Stade 3, stade tardif ou "Chronique"
Le dernier stade de la maladie de Lyme est l'objet d'une violente polémique qui divise le monde médical. En effet, à la suite d'un traitement antibiotique de 3 semaines préconisé par le consensus de 2006 sur la maladie de Lyme, de nombreux patients présentent encore de nombreux symptômes. Deux interprétations issues de deux visions radicalement différentes de la maladie s'affrontent donc :
- La maladie de Lyme est bien guérie, la bactérie a été détruite par les antibiotiques et les causes de ces symptômes sont psychologiques ou simplement liées au décours de l'infection,
- La maladie n'est pas guérie, la bactérie a résisté aux antibiotiques et les causes de ces symptômes sont directement imputables à l'activité de celle-ci.
Aux États-Unis
Deux conceptions de la maladie de Lyme s’affrontent :
- L’IDSA - La société américaine des maladies infectieuses considère la maladie de Lyme comme une maladie à symptômes définis, détectable avec certitude par des sérologies (Wormser et al, 2006). Elle se traite efficacement en deux à quatre semaines d’antibiotiques. Le « syndrome post-Lyme » n’est pas relié à un reste d’infection mais est une manifestation des douleurs de « la vie de tous les jours » ou est lié à des troubles psychologiques.
- L’ILADS - De l’autre côté, plusieurs groupes de médecins dans le monde, notamment l’International Lyme and Associated Diseases Society, estiment que la maladie de Lyme est une maladie bien plus complexe. Ils affirment avoir constaté, dans leur expérience clinique, les lacunes des directives officielles, parfois contraires à la logique. Pour eux, les analyses ne sont pas fiables, du fait de l’abondance des causes ; la clinique est l’élément principal pour le diagnostic (Burrascano, 2008). La maladie de Lyme nécessite des traitements longs et intensifs jusqu’à disparition totale de tous les symptômes. Le syndrome post-Lyme est une réelle infection devenue chronique, soignable avec des traitements de longue durée. Ces médecins sont suivis par de nombreux patients et associations de patients dans le monde, qui se disent guéris par ces méthodes, à l’inverse des méthodes traditionnelles.
Trois états votent une loi
La Législature du Vermont vient d’entériner le projet de Loi H123 sur la maladie de Lyme. Ce projet reconnaît la gravité de la maladie de Lyme chronique, le rôle des co-infections dans la maladie chronique, et la nécessité d’un traitement individualisé selon les lignes directrices de l’ILADS.
Le projet de Loi contient également des termes visant à protéger les praticiens de santé des mesures disciplinaires demandées par le Conseil de l’Ordre du Vermont , de par leurs pratiques diagnostiques et thérapeutiques basées sur les propositions de l’ILADS et relatives aux maladies vectorielles à tiques. Ainsi les thérapeutes peuvent désormais soigner en se prévalant de leur meilleur diagnostic clinique.
Distribution des vecteurs de la borréliose de Lyme aux USA
C’est une énorme avancée politique, et le Vermont se joint maintenant à un nombre croissant d’autres états (3) qui ont adopté des lois de protection des médecins. L’adoption de ce projet de Loi est conforme à une récente étude des CDC montrant que 50% des médecins aux États-Unis diagnostiquent et traitent la maladie de Lyme selon les lignes directrices de l’ILADS, et non celles de l’IDSA.
Officiellement depuis fin 2015
La majorité des états appliquent officiellement les directives qui émanent du NGC (National Guideline Clearinghouse) qui sont celles préconisée par l'ILADS depuis fin 2015.
Au Canada
Le 16 décembre 2014, le projet de loi C-442 sur la maladie de Lyme a été adopté, il vise lui aussi à reconnaître la borréliose de Lyme chronique et à autoriser les traitements antibiotiques au long court.
Ixode scapularis sur le territoire canadien en 2020
En Europe
EUCALB : European Union Concerted Action on Lyme Borreliosis, Action concertée de l’Union Européenne sur la borréliose de Lyme. Le site est créé en 1997 pour fournir des informations sur ses activités mais il n’est actuellement plus financé par l’U.E. La fonction du site est de fournir des renseignements à jour sur la maladie de Lyme en Europe (sous la forme de brèves critiques) et les dernières publications, et aussi pour servir de panneau d’affichage pour les réunions pertinentes des scientifiques. En outre, l’Encéphalite à tiques et la Babésiose zoonotique qui sont transmises par le même vecteur sont maintenant incluses. Bien qu’à la disposition du public en général, les principales cibles du site sont des professionnels de santé, scientifiques et étudiants. Pour les membres du public visitant le site, il convient de noter que l’information fournie vise à appuyer, et non remplacer, la relation qui existe entre un patient et son /sa professionnel(le) de santé. Ce site est actuellement basé à Vienne en Autriche, tout comme le Dr Gerold Stanek (signataire des Guidelines de l’IDSA 2006) qui en semble maintenant le propriétaire.
Pour ne citer qu’eux, d’éminents défenseurs des thèses de l’IDSA font partie du Conseil Consultatif de ce site et en particulier le Prof. Volker Fingerle, président du NRZ (Nationales Referezzentrum für Borreliose = Centre National de Références pour la Borréliose) en Allemagne, le Dr Franc Strle, maintenant à Ljubljana en Slovénie (lui aussi également co-signataire des "’Guidelines" de l’IDSA) ainsi que le Prof. Benoît Jaulhac du CNR Borrelia de Strasbourg (co-auteur du consensus du 13 décembre 2006).
Présence de B. Burgdorferi dans les tiques Ixodes ricinus
En Allemagne
Deux directives concernant la prise en charge de la borréliose tardive coexistent, et sont en vigueur toutes les deux et appliquées au sein du corps médical. Ces deux écoles qui s'affrontent sont l'exacte réplique des deux sociétés savantes américaines IDSA et ILADS. L''une niant complètement l'existence d'une infection persistante, l'autre, la reconnaissant et tentant de la soigner tant bien que mal, avec les médicaments existant à l'heure actuelle : * Deutsche Gesellschaft für Neurologie (société allemande de neurologie) portant le thème «Leitlinie für Neuroborreliose» (recommandations pour la Neuroborréliose) modifiant en octobre 2008 un texte de 2004 et valable jusqu’en 2013 déclaré à l’AWMF (Ass° des S/tés médicales) sous le n° de directive AWMF 030/071. * Deutsche Dermatologische Gesellschaft (société allemande de dermatologie) portant le thème «Kutanmanifestationen der Lyme Borreliose» (manifestations cutanées de la Borréliose de Lyme) ; texte de février 2009 mis à jour en 2011 et déclaré à l’AWMF sous le n° de directive AWMF 013/44.
En France
Les directives de l’IDSA, (Guidelines on Lyme Disease) ont été reprises au niveau européen par l’EUCALB, puis en France par la SPILF en 2006 dans la Conférence de Consensus sur la borréliose qui édicte les lignes de conduite diagnostiques et thérapeutiques.
Partisants du NON
Bactéries qui ne résistent pas aux antibiothérapies
Ils prétendent que les bactéries sont forcément détruites au bout de 3 à 4 semaines d'antibiothérapie. C'est aussi la position officielle, donc les symptômes que vivent les malades après une antibiothérapie réussie est le syndrome post-Lyme ("sémiologie persistante polymorphe après morsure de tique") .
Voici un extrait d'un article sur la borréliose de Lyme issu du site de l'institut de veille sanitaire (http://www.invs.sante.fr/Dossiers-thematiques/Maladies-infectieuses/Maladies-a-transmission-vectorielle/Borreliose-de-lyme/Points-sur-les-connaissances) :
"Le syndrome "post-Lyme", appelé par excès "maladie chronique de Lyme", correspond à l’association d’une asthénie, d’algies diffuses et de plaintes cognitives (troubles de la mémoire et de l’attention) alléguées au décours d’une infection préalable à Borrelia burgdorferi documentée sur le plan biologique et correctement traitée. Plusieurs arguments conduisent à ne pas retenir la responsabilité d’une infection active à Borrelia burgdorferi senso lato dans ce syndrome : un examen neurologique normal, l’absence d’anomalies objectives au plan cognitif, l’absence d’anomalie biologique du LCR et l’absence d’efficacité de la reprise d’un traitement antibiotique."
Transmission par les tiques uniquement
Un autre aspect du NON est aussi les modes de transmission de la maladie, selon eux la maladie ne se transmet qu'uniquement par les tiques (Ixodes ricinus).
Ainsi sur le site du ministère des affaires sociales et de la santé (http://social-sante.gouv.fr/soins-et-maladies/maladies/maladies-infectieuses/article/maladie-de-lyme), on peut lire :
"Mode de contamination: La transmission à l’homme se fait uniquement par piqûre de tique. Les contaminations humaines sont plus fréquentes à la période d’activité maximale des tiques, en France entre le début du printemps et la fin de l’automne."
ou encore de façon plus précise sur le site de l'INVS (http://www.invs.sante.fr/Dossiers-thematiques/Maladies-infectieuses/Maladies-a-transmission-vectorielle/Borreliose-de-lyme/Points-sur-les-connaissances) :
"Comment se fait la transmission ? La transmission de Borrelia burgdorferi se fait à l’Homme par piqûre d’une tique du complexe Ixodes ricinus infectée. Pendant le repas sanguin qui suit la piqûre, les bactéries de l’intestin de la tique passent vers ses glandes salivaires. La transmission par la salive dépend du temps de contact et du taux d’infestation de la tique. Dans les études américaines le risque de transmission apparaît faible pour des durées d’attachement inférieures à 72 heures. En Europe, des données expérimentales et cliniques ont montré que ce délai est plus court avec un risque réel après 24 heures d’attachement. Ce délai dépend du vecteur et de la bactérie car il a été démontré que la transmission de B. afzelii est plus rapide que celle de B. burgdorferi sensu stricto.
L’Homme peut être piqué par une tique à tout stade de son développement (larve, nymphe, adulte). Les nymphes semblent être responsables de la plupart des transmissions. Elles sont en effet, plus nombreuses que les adultes, plus à même de piquer l’Homme (plus de 80% des piqûres dans certaines régions) et aussi moins à même d’être détectées lorsqu’elles sont attachées. Entre 2005 et 2009, le Centre national de référence Borrelia (Institut Pasteur Paris) a collecté 17 000 tiques dans des forêts situées dans 15 communes réparties dans 9 départements de quatre régions métropolitaines (Basse-Normandie, Haute-Normandie, Limousin et Île-de-France). Chaque année, le taux d’infection était plus élevé chez les adultes que les nymphes sauf en 2009. Le taux d’infection médian chez les adultes variait de 19% dans le Limousin à 8% en Basse-Normandie et pour les nymphes de 12% en Limousin à 8% en Basse-Normandie. En Europe, la prévalence moyenne de l’infection à Borrelia burgdorferi dans les tiques est de 13,7% (0-49,1%) bien que la prévalence soit plus élevée chez les adultes (18,6 %) que chez les nymphes (10,1%). Les taux d’infestation les plus élevés (nymphes >11% ; adultes >20%) ont été observés en Europe centrale (Autriche, République Tchèque, Allemagne, Suisse, Slovénie et Slovaquie) (Rizzoli et al. 2011).
La borréliose de Lyme ne se transmet pas :
- de personne à personne,
- par contact direct avec des animaux,
- par voie alimentaire (par exemple : venaison),
- par piqûre d’autres insectes.
Aucun cas de borréliose de Lyme n’a été à ce jour lié à une transfusion sanguine. Des études ont cependant montré que la bactérie Borrelia burgdorferi pouvait survivre dans du sang stocké pour des dons (Nadelman RB et al. 1990 ; Johnson SE et al. 1990). Les données d’études anciennes suggérant que la borréliose de Lyme pouvaient contribuer à des issues de grossesses défavorables n’ont pas été confirmées par des études ultérieures (Maraspin V et al. 1999 ; .Strobino B et al. 1999)."*
Fiabilité des sérologies et protocoles actuels
Les partisans du NON pensent que le protocole et les sérologies préconisées par le consensus de 2006 sont parfaitement fiables.
Toutefois le site du ministère des affaires sociales et de la santé (http://social-sante.gouv.fr/soins-et-maladies/maladies/maladies-infectieuses/article/maladie-de-lyme) reste prudent :
"Diagnostic: Le diagnostic est difficile sur le plan clinique, lorsqu’il n’est pas réalisé au stade d’érythème chronique migrant. Les tests sérologiques ne sont pas totalement standardisés, et restent parfois d’interprétation encore difficile."*
Autres points de désaccords
- Certains partisant du NON pensent que la maladie ne s'enkyste pas, ne change pas de forme.
- La bactérie n'altère pas non plus le système immunitaire de l'hôte.
- D'autres dénient l'existence de co-infections contractés conjointement lors de morsures de tiques.
- La maladie de Lyme d'induit pas de réactions auto-immunes.
Défenseurs du NON ?!
- Pr Allen C. STEERE - USA - Professeur de rhumatologie à l'université Harvard
- Pr Benoît JAULHAC - France - Responsable de la bactériologie au CHRU de Strasbourg / Directeur du Comité national de référence Borrelia
- Dr Pierre KIEFFER - France - Centre Hospitalier de Mulhouse site du Hasenrain
Partisants du OUI
Evidemment être partisant du OUI, c'est potentiellement ne pas respecter le consensus de 2006, et s'exposer de fait à des représailles de la part de l'ordre de médecins ou de la sécurité sociales (voir procés Schaller). Les médecins suivant cette voie sont qualifiés d’« anti-scientifiques », de « charlatans » par les scientifiques de l’autre bord (Auwaerter, 2011). Cela va jusqu’à des interdictions d’exercice, des poursuites en justice. Cependant quelques médecins continuent a exercer en suivant cette ligne thérapeutique quelques soient les risques.
Respectivement "Dr Nicolaus, Pr Perronne, Dr Horowitz"
Les associations de malades (France Lyme, Lyme sans frontière, SOS Lyme, LYM'P.A.C.T...etc) se positionnent majoritairement de ce côté. Elles essayent de faire changer la ligne de conduite nationale (Consensus de 2006) afin de permettre la reconnaissance de la maladie chronique et l'usage d'antibiothérapie au long terme.
Défenseurs du OUI ?!
- Dr Carsten NICOLAUS - Allemagne - Docteur en médecine générale
- Dr Joseph J. BURRASCANO - USA - Docteur en médecine générale
- Dr. Richard HOROWITZ - USA - Docteur en médecine interne
- Pr Christian PERRONNE - France - Chef de service en infectiologie à l'hôpital universitaire Raymond Poincaré de Garches / Président de la Commission des Maladies Transmissibles au haut Conseil de la santé Publique
- Pr Luc MONTAGNIER - France - Professeur émérite à l'Institut Pasteur / Directeur émérite de recherche au Centre national de la recherche scientifique
Le 2016-03-01